Dompter le cheval lousse

6 juillet 2016

theworldsbestever_orig.jpg

Alors que le vidéo avance bien, je me sens pris dans un gouffre de sables mouvants conceptuels en ce qui concerne l'expérience de réalité virtuelle. J'ai sous la main une expérience forte et riche de significations, mais certaines des thématiques qui s'en dégagent évoquent des discours que je ne souhaite pas tenir, notamment sur le féminisme et le contrôle du corps de la femme. Dans sa forme actuelle, l'usager qui fait l'expérience de l'œuvre se trouve face à une femme, nue, grandeur nature, et d'un réalisme troublant. Les détails de ses parties génitales et ses mamelons ne sont pas représentés, laissant plutôt une surface de peau. Ses proportions et la représentation de son corps reprennent les mêmes codes que les œuvres classiques de la renaissance (dont les standards de beauté favorisaient les femmes rondes) à la différence qu'elle ne possède pas de chevelure.  

Le sentiment éprouvé face à ce personnage virtuel est marquant. Une certaine intimité se met en place. On ressent cette présence. Afin de pousser plus loin cette impression, j'ai fait en sorte que le personnage suive l'usager du regard, automatiquement. Un lien se crée.

L'interaction proposée par cette expérience consiste à manipuler le corps de ce personnage tel un pantin. Cependant, l'effet de présence ressenti est si réel que l'usager a une impression empathique bien plus profonde que face à un pantin. Cela produit une forte réaction chez les usagers. C'est perturbant. On se retrouve face à un corps sur lequel on a un total contrôle. Qui plus est, chacune de nos manipulations tendent à déconstruire ce corps : Les articulations étant présentement dérèglées, les membres s'étirent et se mettent à trembler incontrôlablement, alors que la bouche du personnage s'ouvre et que sa tête se renverse, comme sous l'effet d'une extrême douleur. Bien que l'usager ne pose que des gestes lents et en douceur, l'effet projeté sur le personnage est plein de violence.

Bien que prenant, cette expérience est présentement confuse. Elle envoie des messages dans toutes les sens. Qui plus est, elle jette un pavé dans la marre féministe, ce sur quoi je n'ai aucune envie de faire porter cette œuvre. La force explosive de l'expérience que j'aie composée est comme un cheval fou, fait de savon, qui bondit partout en me prenant par surprise et m'échappant. Je dois donc retourner au cœur du propos que je veux transmettre par cette œuvre et la dépouiller de tout ce qui n'est pas cohérent avec cette idée. Il ne me reste que quelques jours pour accomplir cela, et pour ensuite en faire la mise en forme - tout en évitant de rendre trop rigide sa conception. Sacré défi...

Suivant
Suivant

En Préparation du Second Sunday